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Publié le 16 juillet 2019

« TOOL4FOOD permet aux IAA de gagner en performances, en agilité et en innovation ! »

Responsable innovation

Après un BTS de Commerce International, Laurence Declinand débute sa carrière dans l’industrie agroalimentaire où elle se forme aux process industriels. Pendant une vingtaine d’années, elle met son tempérament d’entrepreneur au service de trois entreprises agroalimentaires. Dans ce cadre, elle développe les ventes pour la fabrication de produits de grande consommation sur mesure au bénéfice d’autres industriels – ou « contract manufacturing ».

Forte de cette expérience internationale, elle crée TOOL4FOOD. Il s’agit d’une plateforme qui permet de rapprocher les industriels qui ont de la disponibilité sur leur outil de production avec ceux qui en ont besoin. Résultats : les premiers gagnent en performance industrielle et financière et les seconds en réactivité et en innovation.

Passionnée par le monde de l’industrie, elle raconte son aventure pour la communauté ManagerIA !

« J’ai travaillé dans 3 entreprises spécialistes de la sous-traitance industrielle agroalimentaire très à l’écoute des besoins de leurs clients. »

CT : Pouvez-vous nous parler de votre parcours ?

Laurence Declinand : Avant de créer TOOL4FOOD, j’ai travaillé pendant 20 ans dans l’industrie agroalimentaire. Plus précisément, j’ai travaillé dans 3 entreprises (PME et groupes). Ces dernières étaient des spécialistes de la sous-traitance industrielle, très agiles et à l’écoute des besoins de leurs clients. Elles offraient en fait à leurs clients la souplesse nécessaire pour leur permettre de répondre à leur marché. Ces sociétés intervenaient dans les produits laitiers, les produits surgelés frais et en poudre, mais également dans certains domaines très exigeants comme la nutrition infantile.

Mon rôle consistait à développer les marchés « export » en proposant à des industriels des services à valeur ajoutée autour de la réalisation de produits de grande consommation sur mesure. Il pouvait s’agir de la totalité de la réalisation d’un Produit de Grande Consommation Alimentaire, ou bien d’une partie de sa réalisation : service de formulation, développement industriel, conditionnement…

« Nouveaux conditionnements, surcroît d’activité, essais R&D, plans de continuité de l’activité… »

CT : Pouvez-vous nous donner des exemples d’intervention ?

Laurence Declinand : Par exemple j’intervenais en amont pour permettre à des services commerciaux d’une entreprise de faire réaliser de nouveaux conditionnements pour compléter une gamme ou des échantillonnages afin d’accéder à un nouveau marché…

Également, j’accompagnais des industriels ayant besoin de pallier un surcroît d’activité (nouveaux clients, nouveaux marchés) pour garder un taux satisfaisant de service client.

Parfois aussi, les services R&D avaient besoin, pour faire des essais, d’une technologie non disponible à l’interne tout en craignant de devoir dévoiler leur innovation à l’écosystème.

Enfin, parfois les Directions d’entreprises avaient besoin d’anticiper et de sécuriser leurs marchés avec des fournisseurs fiables ou de mettre en place un plan de continuité de l’activité.

« 85% des IAA subissent des effets de saisonnalité ; 64% des entreprises recherchent des technologies… »

Globalement, en France, 85% des industries agroalimentaires subissent des effets de saisonnalité et n’utilisent pas à 100% leur outil de production sur toute l’année. Et en face, vous avez 64% des entreprises qui recherchent des technologies qu’elles n’ont pas en interne.

« Les besoins techniques ponctuels des IAA ne sont pas satisfaits par manque de moyens et de visibilité. »

CT : D’où l’idée de la plateforme TOOL4FOOD ?

Laurence Declinand : Exactement ! Les sociétés que j’approchais avaient souvent besoin des services que je proposais car ils étaient proches ou complémentaires, voire concurrents de leurs propres savoir-faire. Or, ces besoins n’étaient pas satisfaits ou latents par manque de moyens humains et financiers et par manque de visibilité pour savoir où s’adresser. Par exemple, dans les années 95, je travaillais pour une société dont l’activité, très saisonnière consistait en la fabrication de chantilly pour les fraises. Nous avions identifié, grâce au réseau, un industriel ayant une saisonnalité inversée, avec lequel nous avons échangé des services de stockage en frais et de co-packing.

« Investir dans des outils de production retarde le temps de mise sur le marché. De plus, c’est une grosse prise de risques. »

Investir dans des outils de production retarde le temps de mise sur le marché. De plus, c’est une grosse prise de risques car dans l’alimentaire, les contraintes sont nombreuses et les marchés changeants.

Les entreprises doivent composer avec un manque de visibilité, des aléas divers, des crises sanitaires ou politiques, la volatilité des prix des matières premières, la pression des normes et de la distribution et la contrainte du renouvellement permanent des gammes (50% des produits aujourd’hui en rayons ne le seront plus dans 5 ans).

« Le besoin d’adaptation est permanent, mais les solutions disponibles qui permettraient d’évoluer en souplesse ne sont pas visibles. »

Le besoin d’adaptation est permanent mais les solutions disponibles qui permettraient d’évoluer en souplesse ne sont pas visibles. Aujourd’hui encore beaucoup de sociétés s’avouent démunies, y compris des grands groupes ou les pôles de compétitivité pour aller chercher des solutions opérationnelles.

Or l’enjeu, c’est quand même de produire mieux, c’est-à-dire plus pour satisfaire les 9Mds d’individus en 2050, tandis que les ressources diminuent.

« Il y a beaucoup de capacité de production et de ressources disponibles dans les entreprises qui méritent d’être revalorisées »

En France, du fait de la saisonnalité et des aléas, j’ai perçu qu’il y avait beaucoup de capacité de production et de ressources inutilisées dans les entreprises : capacité à produire, expertise, aliments, matériel … C’est dommage car ces entreprises ont des savoir-faire et des produits exceptionnels appréciés au niveau mondial pour leurs aspects gustatifs, qualitatifs et sécuritaires. Tout cela méritait d’être revalorisé !

« L’anonymat est la clef ! »

CT : Avec l’émergence de l’économie collaborative depuis 10-15 ans, comment expliquez-vous que des plateformes de rapprochement industriel n’existaient pas déjà ?

Laurence Declinand : C’est toute la difficulté de la collaboration sur un marché concurrentiel et très innovant ! Et c’est pour cela que les ressources et besoins ne sont pas visibles.

En fait, dans ce contexte industriel où tout va très vite, l’anonymat est la clef ! Les offreurs de moyens techniques ne veulent pas forcément être visibles. Et les offreurs et demandeurs veulent protéger leurs innovations produits et technologiques ainsi que leurs process.

Dès les années 2005 j’ai pensé à une plateforme d’annonces anonymes permettant de rapprocher l’offre de sa demande en temps réel. Et puis le projet a mûri et j’ai finalement lancé TOOL4FOOD.

La promesse, c’est de permettre aux sociétés de faire émerger toute cette richesse cachée ! De permettre aux industries d’améliorer leur performance industrielle à travers une optimisation de l’utilisation de leurs outils ! De permettre aux entreprises de pouvoir mener à bien leurs projets en utilisant, en toute confidentialité, un outil externe pour innover et lancer de nouveaux produits sur le marché.

« Performances industrielle et financière, souplesse, agilité, innovation, time to market… »

CT : Quelle valeur apportez-vous au secteur Agroalimentaire ?

Laurence Declinand : Les entreprises agroalimentaires constituent le 1er employeur en France. Elles vont devoir faire face à des enjeux importants que nous avons évoqués. Pour cela, elles ont besoin d’améliorer leurs performances et leur agilité pour survivre parce que, pressurée par la Grande Distribution, elles ont aussi le niveau de marge le plus bas depuis 40 ans.

TOOL4FOOD permet tout d’abord aux industries d’améliorer leur performance opérationnelle. Cela signifie une meilleure utilisation des machines, un meilleur remplissage des lignes. Mais ce faisant, c’est aussi un apport de suggestion d’affaires en ligne avec leurs intérêts, la possibilité de s’ouvrir à la sous-traitance en proposant des savoir-faire intermédiaires ou des périodes d’inutilisation des lignes de production. C’est aussi une visibilité nouvelle et différente sur des produits périphériques cachés, le tout en temps réel ! TOOL4FOOD permet aussi aux industries d’améliorer leur performance financière en leur permettant de vendre des produits ou des matières périssables.

TOOL4FOOD, enfin, permet aux entreprises d’être plus agiles, plus innovantes grâce à un accès à de nouvelles technologies sans avoir à investir ou en limitant les risques (baisse du Capex). C’est donc davantage de souplesse tout en préservant la confidentialité sur leur innovation. Ce faisant, cela permet d’accélérer le Time to market et la conquête de nouveaux marchés.

« Nous bénéficions d’une reconnaissance d’experts du secteur ou de grands groupes. »

CT : Où en êtes-vous de votre projet ?

Laurence Declinand : Une première version de la plateforme est en finalisation. Elle sera proposée d’ici septembre à un premier cercle ou réseau qui sera ouvert progressivement aux entreprises du secteur.

Durant cette phase de développement, nous recevons énormément de témoignages encourageants, d’invitations à des salons par des influenceurs reconnus, comme Nutrimarketing. Nous bénéficions d’une reconnaissance d’experts du secteur ou de grands groupes. C’est une phase qui me permet aussi de réseauter et j’ai donc rallié un cercle de futurs utilisateurs. J’ai aussi développé une activité de conseil en parallèle.

C’est ce qui me permet aussi de dépasser toutes les difficultés inhérentes à l’entrepreneuriat.

« La plus grande difficulté est de constituer une équipe pluridisciplinaire avec un vrai goût pour l’industrie. »

CT : Quelles sont ces difficultés ?

Laurence Declinand : La plus grande difficulté est de constituer une équipe pluridisciplinaire : Ingénieur Agro, Responsable marketing/communication avec un vrai goût pour l’industrie, Chief Data Officer… Les compétences techniques liées au digital (le fameux CTO) sont indispensables car elles vont permettre au projet d’évoluer. Il y a un gros challenge lié à l’organisation des données qui vont permettre de rapprocher des entreprises via des projets de fabrication à façon. Une équipe est aussi la condition pour trouver des financements.

Quel business model, par exemple ? « Entre prototypage, recherche de financement, industrialisation, retour client, et production vertueuse, les obstacles à franchir sont nombreux et plus complexes que pour le développement d’un produit ».

Du côté des clients, les Français qui seraient les premiers utilisateurs, sont toujours très prudents vis-à-vis de l’innovation. Mais cela renforce aussi la pertinence du principe d’anonymat de la plateforme.

« TOOL4FOOD est une démarche collaborative et responsable »

Malgré tout, je reste attachée à l’idée que tout le monde a quelque chose à gagner dans TOOL4FOOD qui est une démarche collaborative et responsable ! Les entreprises améliorent ainsi leurs performances et leur agilité ; la France peut plus facilement conquérir des marchés extérieurs et équilibrer l’emploi sur son territoire ; la distribution évite les ruptures ; le consommateur a accès à plus de diversité …

« Ce projet est aussi un accomplissement personnel avec la volonté d’amener aux entreprises agroalimentaires un réel service. »

CT : Quels changements le passage de salariée à entrepreneure a-t-il engendrés chez vous ?

Laurence Declinand : Lorsque j’étais salariée on m’avait laissé beaucoup d’autonomie dans les postes que j’ai eus ou que j’avais créés. Mais travailler pour une société signifie en avoir l’aval.

Dans l’entreprenariat, ce support manque et freine l’avancement. Il faut donc être doublement convaincu et avoir une motivation à toute épreuve pour faire avancer son projet.

Par contre le statut d’entrepreneur donne la possibilité d’échanger plus directement avec des cadres dirigeants de société, qui accordent de la considération par rapport à la prise de risques de l’entrepreneur et de l’attention par rapport au projet.

Propos recueillis par Christelle Thouvenin